On a cédé à la facilité aux dépends de
l’économie en sous-traitant cette semaine de découverte à une agence. Nous
prenons donc la route dans un van climatisé hyper confortable (le hic, c’est
qu’on y dort tout le temps), conduit par Leng qui parle assez d’anglais pour
qu’on échange, avec comme objectif de visiter des villages de minorités
ethniques dans les montagnes du Nord.
Première étape : Luang Nahmta, une
ville-rue sans charme que nous atteignons au bout de 7 heures de trajet (à
peine 200 km, mais la moitié en route défoncée poussièreuse, limite piste).
Heureusement, les paysages de montagne, et
parfois encore de forêt dense, sont impressionnants.
La pétanque, un reste de l'époque coloniale ... Une pensée pour nos amis du Sud ! |
C’est le jour suivant que les choses plus
intéressantes commencent : on prend le poul sur le marché où quelques femmes Akha
ou Thaï-dam sont descendues vendre leurs légumes, racines ou herbes. A quelques
kilomètres de Muang Sing et pas plus de la frontière chinoise, dont nous ne
serons plus jamais aussi près, nous dénichons une guesthouse campagnarde
entourée de rizières et de villages Akha et Yao. Nous retenons sans hésiter les
chambres à… 5€ et partons dans la foulée, accompagnés d’un petit “guide” local
de 8 ans couvert de poussière, à la découverte de son village. Le nombre
d’accompagnants ne cessera de gonfler au cours de l’après-midi et de la matinée
du lendemain, où nous visitons d’autres villages.
Femme de la tribu Akha |
L'heure de la douche chez les Ya-o ... où les déchets plastique ne sont pas ramassés. |
Comment ne pas céder à l'artisanat local ? |
Leng, notre chauffeur, et notre escorte de guides locaux |
Thibaud apprend aux enfants Akhas à compter en Anglais |
Nous y sommes bien accueillis, surtout en
ce dimanche matin où tous les habitants sont là et viennent à la rencontre des
“falangs” (étranger, en lao). Bien sûr, comme partout, on essaie de nous vendre
des babioles fabriquées artisanalement (bon, c’est vrai, les broderies Ya-o
sont tentantes), mais les lao n’ont pas la spontanéité des birmans, sourient
moins facilement et ne se prêtent pas toujours volontiers au jeu des photos.
Thibaud est particulièrement à l’aise avec
les enfants des villages; il offre un petit ballon de foot qu’il gardait dans
son sac à dos depuis 7 mois, et entame avec son frère et leur nouvelle bande de
copains une partie endiablée dans la poussière.
La partie de foot au village |
Séchage des fibres avant le tissage |
Car chaque maison de bois ou de bambou
dispose de télé avec antenne parabolique; à maintes reprises, nous observons
des femmes d’âge mûr (Yao) broder pendant que les jeunes sont scotchés devant
une série à l’eau de rose.
Signe de déforestation |
Et surtout la Chine, toute proche, inonde
les pays frontaliers de produits manufacurés, dont les laotiens (comme les
birmans) sont conscients de la moindre qualité. Mais, comme chez nous en
France, comment résister aux prix bas proposés lorsqu’on en ressent le nouveau
besoin ? Un scooter chinois coûte trois fois moins cher que son homologue
Thaïlandais, et ici, le scooter est essentiel: il est d’ailleurs souvent garé
la nuit dans l’enceinte même de l’habitation, à côté des lits-paillasse.
De plus, les Chinois savent y faire : ils
financent des routes neuves… pour mieux transporter les marchandises qu’ils
exportent ou importer le bois par dizaine de camions. Dans ces régions du Nord
du Laos, la déforestation est vraiment visible sur toutes les montagnes ; alors,
bien sûr, ils replantent des hévéas … dont la sève produira le caoutchouc des
usines pneumatiques chinoises. Fini la colonisation territoriale, l’esclavage
moderne se fait via le commerce transfrontalier ; Leng, notre chauffeur, nous
explique que les agriculteurs sont payés 2€ par jour de travail pour ramasser
des pastèques 7J/7 qui partent par camions entiers sur le marché chinois.
Loin de nous l’idée de blamer les laotiens;
car comment résister au système ? Pour s’acheter TV, scooter, téléphone
portable, il faut l’argent que les chinois leur offrent pour des tâches
agricoles difficiles et mal payées.
Le tourisme est bien plus rémunérateur mais
il nécessite de parler anglais, donc d’aller dans des écoles privées coûteuses,
et peu de familles de minorités ethniques peuvent les financer ; la boucle est
bouclée : mon fils (ou ma fille), tu continueras à travailler dans les champs
pour un salaire de misère !
.
Un de vos meilleurs articles depuis le début, je trouve... La plongée dans les villages laos, les marchés, les enfants qui jouent au foot, la déforestation, et les observations sur l'évolution de ce monde qui s'en va et est remplacé par la mainmise économique chinoise. Ceux-là même qui au XXe Siècle nous donnaient des leçons de communisme et d'anti-impérialisme, envahissent aujourd'hui le monde de leurs produits fabriqués dans des usines où ils sont exploités par leurs classes dirigeantes !
RépondreSupprimerMerci.
Jean-Michel
Grrrrrrrrrrrrrrrrrrrr, ils sont partout ces chinois !!! Bien contente de n'avoir plus ce pays "à ma carte" !!
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